Le Zeekr 9X est la parfaite illustration de la volonté de conquête du marché auto mondial par les Chinois. C'est un colosse de 5,24 mètres de long qui s'immisce avec audace dans le segment ultra-luxueux, jusqu'alors fief incontesté des Rolls-Royce Cullinan et autres Mercedes-Maybach GLS.
Présenté en grande pompe au Salon de Shanghai, ce mastodonte aux proportions impressionnantes (2,03 mètres de large et 1,82 mètre de haut) repose sur un empattement pharaonique de 3,17 mètres. Une ampleur qui n'est pas sans rappeler celle des limousines britanniques d'antan, ces carrioles motorisées où l'espace intérieur primait sur toute considération aérodynamique.
Une mécanique hybride rechargeable
Le groupe motopropulseur de cette cathédrale roulante illustre parfaitement l'approche maximaliste des ingénieurs de Hangzhou. Zeekr a conçu un système hybride rechargeable sophistiqué, mariant un quatre cylindres 2.0 litres turbocompressé développant 279 chevaux à deux moteurs électriques particulièrement vigoureux - l'un à l'avant (290 kW/394 ch), l'autre à l'arrière (370 kW/503 ch). Ce triumvirat mécanique délivre une puissance cumulée permettant à ce paquebot terrestre d'abattre le 0 à 100 km/h en approximativement 3 secondes. Un chiffre qui, il y a une décennie à peine, était l'apanage exclusif des supercars les plus extrêmes.
L'autonomie en mode tout électrique atteint, selon le constructeur, 380 kilomètres ; un chiffre qu'il conviendra sans doute de tempérer sur nos routes européennes. Le bloc thermique n'est d'ailleurs qu'un générateur d'appoint, rappelant en cela la philosophie d'une BMW i3 à prolongateur d'autonomie, en nettement plus imposant. Nettement.
Un écrin de luxe aux dimensions démesurées
L'esthétique extérieure frappe d'emblée par cette imposante calandre verticale chromée. Mais là où l'inspiration trouve sa véritable expression, c'est dans l'habitacle - véritable salon roulant aux dimensions extraordinaires. Un écran arrière de 43 pouces en définition 6K et un système audio dont les spécifications défieraient les installations de certaines salles philharmoniques sont prévus.
La démesure se manifeste jusque dans les moindres détails : portières arrière de plus d'un mètre de longueur, calandre aux proportions défiant l'entendement (1,245 m de large), habitabilité record... Dans la grande tradition des limousines d'apparat, le Zeekr 9X ne sacrifie jamais le confort à l'autel de la praticité. Il renoue, à sa manière, avec cette époque bénie où l'automobile était avant tout un écrin de luxe et non un simple moyen de transport.
Malgré sa dotation pléthorique et ses performances dignes d'une supercar, le Zeekr 9X s'affiche à un tarif qui ferait pâlir les comptables de Crewe. En Chine, ce palace roulant démarre aux environs de 500 000 yuans, soit l'équivalent de 60 000 € au cours actuel. Une somme qui correspond approximativement au prix d'une Peugeot 5008 bien équipée sur notre marché. Oui.
Certes, la version Grand Edition grimpera jusqu'au million de yuans (environ 136 000 €), mais même ce montant reste bien en-deçà des tarifs pratiqués par la concurrence européenne pour des véhicules comparables. À titre d'exemple, un Rolls-Royce Cullinan s'échange contre plus de 300 000 € sur notre continent.
L'assaut européen en préparation
Dans les salons automobiles européens, on observe depuis quelques années les modèles chinois avec un mélange d'incrédulité et d'inquiétude grandissante. Le groupe Geely - cet empire qui compte déjà Volvo, Lotus et Polestar parmi ses fleurons - orchestre avec une patience stratégique l'entrée de Zeekr sur nos marchés.
N'en déplaise aux esprits chagrins qui persistent à voir dans l'industrie chinoise une simple machine à copier, ces nouveaux acteurs ont désormais pris une longueur d'avance dans certains domaines. L'histoire automobile regorge d'exemples de transferts de leadership technologique - des Britanniques aux Américains, puis aux Allemands et aux Japonais. Sommes-nous en train d'assister à un nouveau changement de garde ?
La célèbre boutade attribuée à Ettore Bugatti à propos des Bentley - "de formidables camions de course" - pourrait aujourd'hui s'appliquer à ces nouveaux mastodontes chinois, avec cette différence fondamentale : leur prix. C'est peut-être du côté de Hangzhou que se dessine une nouvelle définition du luxe automobile, conjuguant démesure et accessibilité d'une manière qui déconcerte notre vision occidentale.