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La Lola B12/69EV et son record de vitesse électrique méconnu

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Qui aurait imaginé qu'une voiture silencieuse puisse faire autant de bruit dans le monde automobile ? La Lola B12/69EV a prouvé en 2013 que l'avenir de la performance n'appartient plus exclusivement aux moteurs thermiques.

texte Mathias Pivert
photo Drayson Racing Technologies

Lorsque la Lola-Drayson B12/69EV franchit la barre des 328 km/h sur la piste de RAF Elvington dans le Yorkshire en juin 2013, elle ne se contentait pas de battre un record : elle pulvérisait littéralement quarante années de domination. Ce prototype électrique, né de l'alliance entre le légendaire constructeur britannique Lola et Drayson Racing Technologies, venait d'établir une nouvelle référence mondiale pour les véhicules de moins de 1000 kg, détrônant un record de 282 km/h qui semblait immuable depuis 1973.

L'alliance de l'expertise : la naissance du projet Lola-Drayson

Le projet B12/69EV naît en 2011 de la rencontre entre deux univers complémentaires. D'un côté, Lola Group, constructeur mythique fort de plus de cinquante années d'expérience en compétition automobile, ayant notamment des châssis de monoplaces et des prototypes d'endurance. De l'autre, Drayson Racing Technologies, société de recherche et développement fondée par Lord Paul Drayson, ancien ministre britannique de la Science et de l'Innovation, converti aux technologies vertes appliquées au sport automobile.

Roue arrière carénée pour la Lola B12/69EV

« Lola a été reconnue tout au long de son histoire comme une entreprise techniquement aventureuse qui a contribué à façonner l'industrie du sport automobile », expliquait Robin Brundle, directeur général de Lola Group lors de l'annonce du partenariat. Cette collaboration ambitieuse réunit un écosystème technologique impressionnant : BAE Systems pour les batteries structurelles en carbone, Multimatic pour les amortisseurs à récupération d'énergie, Cosworth pour les systèmes de contrôle électronique, ou encore l'université de Warwick pour les matériaux durables avancés.

Lord Drayson, assis sur le ponton, à l'origine du record

Le choix de transformer un châssis de Le Mans Prototype (LMP1) n'est pas anodin. Cette base, déjà optimisée pour l'efficacité aérodynamique et la légèreté, offre le terrain d'expérimentation idéal pour repenser intégralement la motorisation d'une voiture de course.

Une révolution technologique sur quatre roues

La B12/69EV repousse les limites de l'ingénierie électrique avec un groupe propulseur révolutionnaire. Quatre moteurs YASA-750 à flux axial, développés par Oxford YASA Motors, délivrent ensemble plus de 850 chevaux et un couple phénoménal de plus de 4000 Nm. Cette architecture quadrimotrice, inédite dans l'automobile de course, permet une répartition optimale de la puissance sur chaque roue.

L'exploit technique réside dans la compacité de ces moteurs : chaque unité ne mesure que 7 litres pour seulement 25 kg, soit un rapport poids-puissance exceptionnel de 160 kW par moteur. Cette prouesse d'ingénierie témoigne des avancées considérables réalisées dans la technologie des moteurs électriques, loin des premières tentatives balbutiantes des années 1990.

La voiture intègre également des innovations remarquables comme la charge inductive sans contact développée par Halo IPT, l'aérodynamique mobile inspirée des prototypes modernes, et surtout un système d'amortissement régénératif électrique signé Multimatic. Ce dernier récupère l'énergie des mouvements de suspension pour alimenter les batteries, optimisant ainsi l'autonomie et les performances.

160 kW par moteur, moins de 1000 kg, ça pousse sur la Lola B12/69EV

L'ensemble du système électrique repose sur des batteries composites BAE Systems, intégrées structurellement au châssis pour minimiser le poids tout en maximisant la rigidité. Cette approche holistique de la conception illustre la maturité atteinte par les technologies électriques dans l'automobile de compétition.

Un record qui brise quarante années de domination thermique

Le 21 juin 2013 restera gravé dans les mémoires comme le jour où l'électrique a définitivement prouvé sa légitimité en matière de performance pure. Sur l'ancienne base aérienne de RAF Elvington, la B12/69EV franchit la barre symbolique des 204 mph (328 km/h), établissant un nouveau record mondial pour les véhicules électriques de moins de 1000 kg.

Cette performance revêtait alors une dimension historique particulière : l'ancien record de 175 mph (282 km/h) tenait depuis près de quarante ans, époque où les voitures électriques relevaient encore de l'expérimentation confidentielle. L'écart de plus de 46 km/h témoignait de l'accélération spectaculaire du progrès technologique dans ce domaine.

La B12/69EV ne se contentait pas de ce seul exploit. Elle établissait également les temps de référence pour les véhicules électriques au prestigieux Festival of Speed de Goodwood en 2012 et 2013, se classant même troisième toutes catégories confondues lors de cette dernière édition.

La B12/69EV à Goodwood

Au-delà des chiffres, ce record symbolisait une transition majeure dans l'industrie automobile. La B12/69EV prouvait que les technologies électriques pouvaient désormais rivaliser avec les motorisations conventionnelles les plus performantes, ouvrant la voie aux supercars électriques contemporaines. Son héritage se retrouve aujourd'hui dans les hypercars de série comme la Rimac Nevera ou la Pininfarina Battista.