Une startup méconnue du grand public pourrait bien transformer l'avenir de la propulsion électrique. Yasa Motors, fondée en 2009 dans l'Oxfordshire par le Dr Tim Woolmer, vient de franchir un cap extraordinaire : développer un moteur électrique délivrant 738 chevaux pour un poids plume de seulement 13,1 kilogrammes. Ce rapport poids-puissance de 56 chevaux au kilo établit un nouveau record mondial, surpassant même les technologies aérospatiales les plus avancées.
Une genèse universitaire aux ambitions démesurées
L'aventure Yasa commence dans les couloirs de l'université d'Oxford, là où Tim Woolmer développe ses recherches sur les moteurs à flux axial. Cette technologie, radicalement différente des moteurs radiaux conventionnels, place les bobinages perpendiculairement à l'axe de rotation plutôt que parallèlement. Une approche qui peut sembler anecdotique mais qui révolutionne littéralement les performances.
Fondée il y a quinze ans, Yasa s'est d'abord spécialisée dans les applications haute performance, séduisant rapidement les constructeurs les plus exigeants. Ferrari fut l'un des premiers à adopter cette technologie révolutionnaire, intégrant les moteurs Yasa dans sa SF90 Stradale puis dans la 296 GTB. Une validation prestigieuse qui ouvrit rapidement les portes de Lamborghini, où les moteurs Yasa équipent désormais la Revuelto et la Temerario.
En 2021, Mercedes-Benz comprit l'importance stratégique de cette technologie et racheta l'entreprise britannique. Loin de brider l'innovation, cette acquisition permit à Yasa de bénéficier des moyens industriels du géant allemand tout en conservant son indépendance dans la recherche. Le concept-car AMG GT XX, dévoilé récemment, embarque ainsi trois moteurs Yasa pour une puissance cumulée de 1 360 chevaux.
La révolution du flux axial : quand la physique défie l'impossible
La prouesse technique de Yasa repose sur une approche fondamentalement différente de la motorisation électrique. Là où les moteurs radiaux traditionnels alignent leurs bobinages parallèlement à l'axe, la technologie axiale les dispose perpendiculairement, créant un champ magnétique dans le sens de la longueur du moteur.
Cette configuration présente des avantages considérables. Le couple, défini par la formule Force x Rayon, bénéficie immédiatement du rayon supérieur d'un moteur axial. De plus, l'absence de culasse magnétique réduit la masse de fer du stator de 80 %, permettant d'atteindre des densités de puissance deux à trois fois supérieures aux machines conventionnelles.
Le refroidissement par huile directe, facilité par cette architecture, permet une performance soutenue exceptionnelle. Alors qu'un moteur radial de 200 kW ne délivre généralement que 50 % de sa puissance en continu (soit 80 à 100 kW), un moteur Yasa équivalent maintient 150 kW en permanence. Une différence fondamentale qui rappelle l'évolution des freins à disques ventilés par rapport aux tambours d'antan.
L'avenir de la performance électrique se dessine aujourd'hui
Cette révolution technique ouvre des perspectives inédites pour l'industrie automobile. La réduction drastique du poids et de l'encombrement des moteurs permet aux constructeurs d'envisager des batteries plus petites sans sacrifier l'autonomie, ou inversement d'augmenter les performances sans alourdir le véhicule.
Tim Woolmer, directeur technique de Yasa, précise que « ce résultat est une démonstration d'innovation industrialisable, sans recours à des matériaux exotiques ni à l'impression 3D ». Cette approche pragmatique garantit une production en série possible, avec un objectif de 50 000 unités annuelles depuis le site d'Oxfordshire.
L'impact sur l'automobile de demain pourrait être considérable. Imaginez des sportives électriques aussi légères que leurs homologues thermiques, des berlines familiales aux performances dignes des supercars d'hier, ou encore des véhicules utilitaires transformés par cette efficacité énergétique révolutionnaire.