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Avec sa GT Track Sport, Mercedes franchit la limite et nous propose (peut-être) une vision de l'héritière de l'AMG GT3 Evo

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Certains constructeurs promettent l'extrême. AMG, lui, l'emmène sur circuit pour le prouver. Et ce n'est qu'un début.

texte Geoffroy Barre
photo Mercedes-AMG

Dans les ateliers d'Affalterbach, berceau historique de Mercedes-AMG, un prototype rouge et jaune accumule les tours de piste. Pas une simple déclinaison de plus dans la famille GT, encore moins une banale version sportive destinée à gonfler un catalogue. Le Concept AMG GT Track Sport incarne une démarche autrement plus radicale : explorer les frontières physiques de ce qu'une automobile peut accomplir sur circuit, sans le carcan des contraintes d'homologation routière.

Présenté en juillet dernier après ses dernières mises au point, ce laboratoire roulant entame désormais sa phase d'essais intensive sur les circuits les plus exigeants. Michael Schiebe, président du conseil d'administration de Mercedes-AMG, ne cache pas son ambition : « Nous avons une vision et nous faisons une promesse : l'avenir sera extrême », comme l'explique le communiqué officiel Mercedes-Benz. Dans un paysage automobile où les superlatifs se galvaudent, cette déclaration mérite qu'on s'y attarde.

AMG et la course : une histoire de passion dévorante

Pour comprendre la portée du Concept AMG GT Track Sport, il faut se replonger dans l'ADN même de la marque à l'étoile sportive. En 1967, deux anciens ingénieurs de Mercedes-Benz, Hans Werner Aufrecht et Erhard Melcher, fondent AMG à Burgstall, avant de s'installer à Affalterbach. Leur obsession : extraire le maximum de puissance des blocs Mercedes pour la compétition. Le G désigne d'ailleurs Grossaspach, ville natale d'Aufrecht. Dès ses premières années, AMG s'illustre sur les circuits avec des Mercedes préparées qui dominent leurs catégories.

Cette filiation compétition ne s'est jamais démentie. Des 300 SEL 6.8 AMG qui terminèrent deuxièmes aux 24 Heures de Spa en 1971 aux dominatrices DTM des années 1990, en passant par les CLK GTR qui ont terrorisé le championnat FIA GT à la fin des années 1990, la marque d'Affalterbach n'a cessé de prouver sa légitimité sportive. Même après son intégration complète au sein de Mercedes-Benz en 2005, AMG a maintenu cette quête de performance absolue, comme en témoignent les victoires en Formule 1 ou le record du Nürburgring établi par la Mercedes-AMG ONE avec son bloc de F1 adapté à la route.

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Le Concept GT Track Sport s'inscrit naturellement dans cette lignée. Il n'est pas question de simple marketing, mais bien d'un retour aux sources : créer une machine pensée d'abord pour le chronomètre, la trajectoire parfaite et l'adrénaline pure.

Un laboratoire roulant aux ambitions démesurées

Les premières informations techniques demeurent volontairement parcellaires. Mercedes-AMG cultive le mystère tout en laissant filtrer quelques éléments révélateurs. Le concept repose sur une philosophie tripartite : masse optimisée avec une répartition équilibrée, motorisation V8 typique d'AMG, et aérodynamique sophistiquée. Cette trilogie rappelle les fondamentaux de toute voiture de compétition réussie, mais poussés ici à leur paroxysme.

Le châssis léger constitue la première pierre de l'édifice. Sans les contraintes d'homologation routière, les ingénieurs disposent d'une liberté totale pour privilégier la rigidité et la légèreté. L'utilisation massive de fibre de carbone et d'alliages légers semble une évidence, même si Mercedes-AMG reste discret sur les chiffres précis. L'objectif avoué : « explorer les limites physiques » selon les termes mêmes du constructeur.

Côté motorisation, impossible d'imaginer autre chose qu'une version survitaminée du V8 biturbo 4.0 litres qui équipe déjà les déclinaisons les plus affûtées de la famille GT. Les GT Black Series développant 730 chevaux, on peut légitimement penser que la Track Sport franchira allègrement la barre des 800 chevaux, voire davantage. La sonorité caractéristique de ce V8 à vilebrequin plat, avec ses crépitements aux décélérations, fait partie intégrante de l'expérience AMG.

Mais c'est sans doute l'aérodynamique qui recèle les innovations les plus spectaculaires. Les images du prototype camouflé révèlent des appendices imposants : aileron arrière surdimensionné, diffuseur agressif, prises d'air démultipliées. Chaque élément vise à maximiser l'appui tout en gérant les flux d'air pour le refroidissement des organes mécaniques sollicités à l'extrême.

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Une phase d'essais sans compromis

Depuis juillet, le prototype entame sa validation sur les circuits les plus exigeants. Mercedes-AMG ne communique pas sur les pistes choisies, mais on imagine aisément le Nürburgring Nordschleife, référence absolue avec ses 20,8 kilomètres et ses 154 virages. Peut-être aussi Hockenheim, situé à proximité d'Affalterbach, ou encore des circuits internationaux plus confidentiels permettant de travailler loin des regards indiscrets.

« Nous visons à valider tous les systèmes et composants complexes en interaction dans les conditions les plus difficiles », précise le communiqué officiel. Cette phase de validation ne se limite pas à quelques tours de piste chronométrés. Il s'agit de soumettre chaque élément mécanique, chaque système électronique, chaque liaison au sol à des contraintes répétées et prolongées. Les freins carbone-céramique doivent encaisser des dizaines de freinages brutaux sans fadage. Les suspensions doivent absorber les compressions violentes dans les enchaînements rapides. Le refroidissement doit rester optimal même après de longues sessions intensives.

Au-delà de la Black Series

La question brûle les lèvres des passionnés : quelle place pour ce Concept GT Track Sport dans la galaxie AMG ? La Mercedes-AMG GT Black Series, dévoilée en 2020, représentait déjà l'apogée de la gamme GT avec ses 730 chevaux, son 0 à 100 en 3,2 secondes et son aérodynamique travaillée. Homologuée pour la route, elle reste néanmoins utilisable quotidiennement, du moins en théorie.

Le Concept Track Sport se situe ailleurs. Plus radical, libéré des contraintes d'homologation, il s'apparente davantage aux Porsche 911 GT3 RS ou aux McLaren Senna évoquées par les observateurs. Certains y voient même une réponse potentielle aux hypercars de piste comme l'Aston Martin Valkyrie AMR Pro ou la Mercedes-AMG ONE elle-même. La différence fondamentale réside dans l'absence de compromis : cette machine ne sera probablement jamais confortable, docile en ville ou utilisable sous la pluie. Elle existe pour un seul objectif : la performance chronométrique absolue.

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Cette stratégie n'est pas nouvelle chez les constructeurs de prestige. Ferrari propose ses XX non homologuées depuis 2005, Porsche a décliné plusieurs variantes de piste pures, McLaren a créé sa division MSO pour répondre aux demandes les plus extrêmes. AMG franchi le pas à son tour, affirmant sa légitimité dans ce segment ultra-exclusif où les voitures se comptent en dizaines d'exemplaires et où les prix flirtent avec le million d'euros.