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Longbow Speedster, l'électrique avec l'essence du roadster

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Pendant qu'Elon Musk fait attendre le monde entier, une start-up britannique vient de réaliser en six mois ce que Tesla promet depuis huit ans. Un roadster électrique ultraléger qui pèse moins qu'une Mazda MX-5.

texte Inès Allard
photo Longbow Motors

Dans un hangar sous les arches victoriennes de Brixton, à Londres, un petit constructeur automobile vient de démontrer que l'agilité entrepreneuriale peut encore l'emporter sur les promesses marketing des géants californiens. Longbow Motors, fondée en 2023 par deux anciens ingénieurs de Tesla, Daniel Davey et Mark Tapscott, a dévoilé son Speedster EV, un roadster électrique qui ne pèse que 895 kilogrammes.

Le prototype a été développé en seulement six mois, du premier trait de crayon à la présentation publique, là où l'industrie traditionnelle nécessite habituellement 18 mois minimum pour atteindre ce stade.

Un poids plume dans un monde de poids lourds

La bataille contre le poids constitue le principal défi des véhicules électriques modernes. Les batteries, indispensables au fonctionnement, alourdissent considérablement l'ensemble. Une Volkswagen ID.3, pourtant compacte, affiche déjà 1 800 kilogrammes à la pesée. La MG Cyberster chinoise, concurrent direct du Longbow, culmine même à 2 204 kilogrammes. Face à cette inflation pondérale, le Speedster fait figure d'exception avec ses 895 kilogrammes, soit 40 % de moins qu'une Lotus Emira V6 et 16 % de moins qu'une Mazda MX-5 Miata, référence absolue en matière de légèreté parmi les sportives thermiques contemporaines.

Longbow Speedster, l'électrique avec l'essence du roadster

Cette prouesse repose sur une architecture rigoureusement pensée. Le châssis utilise un aluminium extrudé, technique qui permet d'optimiser le rapport rigidité-masse. La carrosserie fait appel à des composites légers. La batterie, d'une capacité de 52 kilowattheures, s'intègre directement dans la structure du châssis selon le principe « module-to-chassis », économisant ainsi poids et volume. Cette solution technique, développée par Watt Electric Vehicle Company basée en Cornouailles, constitue le socle de la plateforme PACES (Passenger And Commercial EV Skateboard) sur laquelle repose le Speedster. L'ensemble s'articule autour d'une suspension multibras à l'avant comme à l'arrière, garantissant précision et feedback au conducteur.

Cette obsession de la légèreté ne sacrifie pas les performances pour autant. Le moteur électrique monté sur l'essieu arrière développe environ 270 chevaux, chiffre que Longbow annonce comme provisoire. De quoi propulser l'ensemble de 0 à 100 kilomètres par heure en 3,5 secondes, chronomètre en main. L'autonomie WLTP s'établit à 443 kilomètres, distance plus que respectable pour un véhicule destiné à procurer du plaisir sur routes sinueuses plutôt qu'à avaler des autoroutes. À titre de comparaison, la Lotus Emira V6 nécessite 4,2 secondes pour atteindre le même cap, tandis que la MX-5, malgré sa légèreté thermique, demande 5,6 secondes.

Une équipe d'anciens combattants de la révolution électrique

L'histoire de Longbow débute dans les couloirs de Tesla et Lucid, deux pionniers de l'électromobilité qui ont façonné l'industrie actuelle. Daniel Davey et Mark Tapscott y ont occupé des postes stratégiques, observant de l'intérieur les écueils d'une intégration verticale poussée à l'extrême. « L'intégration verticale est un piège », affirme Davey, qui a vu Tesla et Lucid reproduire les erreurs des constructeurs traditionnels en investissant des milliards dans le développement interne de composants. Longbow adopte une philosophie radicalement opposée : le design extérieur reste maison, mais l'ensemble de la partie technique provient de fournisseurs spécialisés. Moteur électrique, onduleur, électronique de puissance, freinage, éclairage, tout est sourcé auprès d'experts de leur domaine.

Longbow Speedster

Cette approche pragmatique explique en partie la rapidité de développement. Rejoints par Jenny Keisu, ancienne directrice générale du constructeur de bateaux électriques X Shore et investisseur technologique suédois, les deux fondateurs ont constitué une équipe restreinte mais redoutablement efficace. Pour crédibiliser leur projet, ils ont également attiré un conseil consultatif impressionnant : Mike Flewitt, ancien directeur général de McLaren, Michael van der Sande, qui a dirigé Alpine après des passages chez Lucid Europe et le laboratoire secret de Jaguar Land Rover, et Dan Balmer, ancien président de Lotus Europe.

Un design qui dialogue avec l'histoire automobile britannique

L'esthétique du Speedster puise dans le répertoire des grands roadsters des années 1960 et 1970. Les proportions évoquent la Shelby Cobra, cette anglo-américaine brutale qui terrorisait les circuits européens. La partie avant rappelle le Shelby Daytona Coupé et la Ferrari 250 GTO par sa surface tendue et continue, comme une peau étirée sur une structure minimaliste. L'arrière adopte un langage plus contemporain, angulaire et dynamique, créant un dialogue visuel entre passé et présent. Cette dualité s'exprime particulièrement bien avec la peinture bicolore qui sera proposée en série, soulignant les différentes sections de la carrosserie.

Longbow Speedster, une ligne de Ferrari Monza SP1 ?

La silhouette globale dessine la courbe d'un arc long médiéval tendu, référence assumée qui a donné son nom à la marque. Le Longbow, cette arme qui fit la gloire des archers anglais à Crécy et Azincourt au XIVe siècle, symbolise ici la précision, la puissance et l'efficacité britanniques. Certains observateurs décèlent également des influences de la Maserati Bora dans les ailes avant, ou de l'Alfa Romeo 8C dans le traitement arrière. Autant de références flatteuses pour un premier projet.

Mesurant 4,2 mètres de long pour 1,8 mètre de large, le Speedster affiche des dimensions quasi identiques à l'Alpine A110, autre référence moderne en matière de sportive compacte et légère. Contrairement aux Ferrari Monza SP1 ou Aston Martin V12 Speedster dont il partage la philosophie radicale, le Longbow ne dispose d'aucun pare-brise, renforçant son caractère extrême. Cette absence implique théoriquement le port d'un casque pour une utilisation légale sur route ouverte, détail qui ne devrait pas effrayer les 150 premiers clients dont les commandes sont déjà enregistrées.

L'intérieur reste à finaliser sur le prototype présenté, mais les esquisses de design révèlent une philosophie claire : retour à l'essentiel. Pas d'écran tactile sur la planche de bord, juste deux cadrans circulaires classiques face au conducteur. Une clé de contact mécanique, élément devenu rare à l'ère du démarrage sans clé. Un levier central servant de sélecteur de mode de conduite pour les positions P, N, R et D. Cette sobriété assumée répond à un cahier des charges ambitieux que Longbow nomme « l'accord centenaire » : créer un design intemporel qui restera désirable dans cent ans, à l'image de la Jaguar Type E qui fascine toujours les regards soixante ans après sa création.

3/4 avant séduisant

Longbow ne possède pas encore d'usine. Cette situation, potentiellement handicapante pour un constructeur traditionnel, devient un atout dans la logique de la jeune entreprise. Plusieurs options restent ouvertes. L'usine Lotus d'Hethel, largement sous-utilisée malgré la production de l'Emira, pourrait accueillir l'assemblage. Watt EV envisage également la construction d'une nouvelle usine dans la région de Coventry dédiée aux véhicules basés sur sa plateforme PACES. Cette flexibilité permet à Longbow de ne pas immobiliser des capitaux dans des installations fixes avant d'avoir validé son modèle économique.

Les ambitions affichées restent mesurées : 150 exemplaires du Speedster dans un premier temps, puis environ 2 000 véhicules par an en combinant le Speedster et sa future variante fermée sobrement baptisée Roadster. Cette dernière, curieusement plus lourde de 100 kilogrammes à 995 kilogrammes, offrira un toit et un pare-brise pour une utilisation quotidienne plus pratique. Elle sera commercialisée à partir de 64 995 livres sterling, soit environ 74 000 euros, contre 84 995 livres, environ 97 000 euros, pour le Speedster découvert. L'objectif à long terme vise 10 000 voitures produites d'ici 2030, chiffre ambitieux mais réaliste au regard de la demande déjà exprimée.